Louvre Pour Tous

"Y a un truc en particulier que vous voudriez voir pendant que vous êtes à Paris?"
Je ne pose jamais cette question sans appréhension tant je sais que la réponse la plus probable sera:
"Oh oui! La Joconde!"
Non, vraiment, la perspective de plonger dans la marée humaine louvrière ne m'enchante guère.
Pourtant, je n'ai rien contre Mona Lisa. Rien contre une visite au Louvre non plus d'ailleurs. Au moins puis-je espérer grappiller un peu de Raphaël entre deux vagues de touristes et faire ensuite connaître mes hôtes, s'ils ne sont pas déjà épuisés, le calme et la sérénité monacale de la cour Marly, de la cour Puget ou des salles consacrées aux antiquités orientales -entre autres.
Il faut bien avouer qu'elle est quand même mieux installée dans ce sanctuaire lumineux, Mona Lisa, que dans l'horrible petite salle toute poussiéreuse dans laquelle je l'ai rencontrée pour la première fois il y a de çà... oh mazette... plus de 25 ans... A l'époque (paléolithique...), je n'ai eu aucune peine à la regarder dans le blanc de ces foutus yeux qui ne vous lâchent pas du regard... aussi longtemps et aussi près que je le souhaitais.
Aujourd'hui, le parcours est fléché -il ne faudrait surtout pas perdre de temps en s'extasiant devant les primitifs italiens des salles précédentes-, on joue des coudes dès la volée d'escalier menant à la Victoire de Samothrace et l'on ne peut approcher l'oeuvre à moins de cinq mètres de la vitrine. La foule est parfois si dense que dégainer un carnet format passeport pour prendre quelques notes relève d'un numéro de contorsionniste.
Je l'ai dit plus haut, cette Mona Lisa n'est pas un tableau que j'affectionne particulièrement mais que voulez-vous, je suis ainsi faite que j'aime pouvoir explorer les émotions et sentiments qui naissent en moi à la contemplation d'une oeuvre, même si ils ne sont pas agréables.
Surtout s'ils ne sont pas agréables.
Il faut du temps sur place pour valider une impression d'indifférence, pour oser se formuler que non décidément, ça ne me fait ni chaud ni froid, ne m'inspire rien. Il faut du temps sur place parfois pour se remettre de la rencontre avec un tableau, comprendre la colère qui vous surprend comme une claque ou reprendre ses esprits après un coup de foudre.
Nos institutions culturelles nationales, sont aujourd'hui soumises à la même logique commerciale que n'importe quelle entreprise privée et ne permettent plus ce temps de latence qui font de ces institutions des lieux de cultures et non des parcs d'attraction à thème.
Vous vous demandez peut-être pourquoi je parle de çà maintenant, alors que dans nos rues la révolte gronde fort contre le démontage systématisé de notre système de protection sociale.
Tout simplement parce que j'ai lu cet article paru sur "Passée des Arts" et que c'était l'occasion de faire un clin d'oeil ici à Jean-Christophe et de faire connaître son excellent blog.
Cela me permet également de signaler l'existence de Louvre pour Tous dont les revendications sonnent justes à mes oreilles et ne me semblent pas si déconnectées de l'actualité qu'elles en ont l'air.
Rho et puis bon, si on ne peut plus faire un petit billet d'humeur à côté de la plaque sur son propre blog, alors...
;o)
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Reader Comments (10)
Merci pour ce double clin d'œil, chère Rachel :o) Je ne suis, tout comme toi, pas très Jocondophile, mais si tu veux entamer ta réconciliation avec ce tableau, je te conseille, si tu ne la connais pas, l'analyse qu'en fait Daniel Arasse dans "Histoires de peintures" (qui existe en édition de poche). Un petit morceau pour te mettre en appétit ? "Moi, j'étais dans l'état d'esprit d'un spectateur de la deuxième moitié du XXe siècle, c'est-à-dire qu'on avait tellement vu La Joconde, on la connaissait tellement, qu'elle était devenue plus une plaisanterie qu'autre chose..."
Tu l'auras compris, je ne suis pas fâchée avec la Joconde, je suis plus frustrée de ne pouvoir mieux explorer ce que je ressens face (enfin... de trois quart et à dix mètres...) à elle comme c'était encore possible il y a moins de dix ans.
Et j'hésite à relire Arasse... parce que me connaissant j'aurais une furieuse envie d'aller constater sur place que la petite tache, là et le trait ici... C'est infernal! ^^°
Lorsque j'allais au Louvre il n'y avait pratiquement personne c'était il y a quarante ans! Le dimanche matin ... Un désert, j'admirais surtout Paolo Uccello "la bataille" quel modernisme dans cette toile!
Ceci dit, certaines salles sont encore tout à fait pratiquable... le département des sculptures par exemple. Les gens ont encore la possibilité de tranquillement croquer les oeuvres tout en papotant.
doodledee-doodledum
à droite les Noces de Cana, non ? Là, il vaut mieux avoir un peu temps pour se promener dedans ;-) et si je ne me trompe pas de tableau, l'histoire de sa restauration et les découvertes des scientifiques à cette occasion sont passionnantes .
j'avoue qu'elle ne me fait pas grand effet non plus, et ce d'autant plus que la foule qui se presse devant son sourire me gonfle prodigieusement.... je préfère les autres salles du Louvre, on y est bien plus tranquille, et le plus chouette c'est qu'on découvre toujours des endroits inconnus où l'on peut s'émerveille en toute quiétude...
(et les Noces de Cana c'est juste LE BONHEUR du regard cette toile, je l'adore)
bah oui, les Noces, c'est quelquechose quand même! Et juste de l'autre côté du mur, dans la gallerie, d'autres Léonard (merveilleux Jean Baptiste), des Raphaël, et cette petit merveille de tendresse qu'est le "portrait d'un vieillard et d'un jeune garçon" de Ghirlandaio.
Il fut un temps ou mon frangin, histoire de nous secouer les puces avant que nous ne nous mettions a sentir le moisi a force d'étudier, criait Ala porte de ma chambre, prends un gouter, on saute dans le 21, on va au Louvre. L'affaire était d'importance, la distraction gratuite, mais avant tout, c'était une excursion. Nous apercevions la Joconde dans le fond d'un couloir, tracions devant le radeau de la méduse, et filions chercher les coins inconnus, les salles sombres, les endroits ou l'esprit était encore la, et ou nous faisions, parfois, des blagues aux touristes. Le Louvre était alors a nous, c'était une vieille dame, mais elle avait vécu des folies...
Je revenais seule souvent, pour etudier. j'avais mes habitudes. le Veronese et ses 4 points de fuite, juste pour touner le dos a qui tu sais, je m'en souviens d'avant les restaurations, les couleurs étaient très douces...
Mais je digresse. La joconde, je ne l'aimais pas trop. Jusqu'a ce que je me prenne d'affection pour Leonard et pas ce qu'on en apprend...et puis je ne sais pourquoi, j'ai commence a regarder le paysage, derrière elle...j'aime beaucoup, il m'est arrive de rêver qu'on le voyait depuis la Tour de Babel de Brugel...et puis coup de grâce a mon indifférence, j'ai appris qu'elle était presque assurément enceinte quand elle posait...et je me suis surprise, enceinte moi aussi, avec le même sourire. Un sourire en dedans. Je trouve ça limite indécent de la part de Leo d'avoir réussi a chopper ce genre de moment la.
Je ne sais pas si je l'aime bien maintenant, mais je la tolère beaucoup mieux.
Bref. Tu disais quoi? Ha oui, je veux bien du the, jen'en sais pas pourquoi, j'ai la gorge un peu seche, j'ai du trop parler aujourd'hui.
raconte encore!
(haaaaaan... le coup de la vue depuis la Tour de Babel... ça me rappelle le peu d'histoire de l'art qu'on ait eu au collège...)
C'est jamais "oui, le Crazy Horse" ?
mais non, pas jusqu'à présent ^^°
pas subjuguée, non plus!
je l'ai vu un matin tôt, vite fait, à l'ouverture, en semaine, pour éviter la foule. juste pour voir si j'allais tomber sous sous charme, juste pour voir si elle allait me suivre des yeux.... et ...rien pas d'émotion.
J'ai été beaucoup plus touchée, il y a quelques temps en voyant les graffitis laissés par des prisonniers il y a quelques siècles dans une des tours de la Rochelle!!!
bon WE
je l'ai vu à l'ouverture, en semaine pour éviter la foule. juste pour voir si j'allais ressentir quelque chose, juste pour voir si elle allait me suivre des yeux ... et ... rien ...elle est très belle, mais aucune émotion !
j'ai été mille fois plus touchée lorsque j'ai vu des graffitis laissés il y a quelques siècles par des prisonniers dans une des tours de la rochelle
A mon humble avis, il n'est pas si "à côté" ce billet . car tout est lié , et cette logique commerciale qui appauvrit et vide de tous sens les espace de culture ou de création fait partie des rouage de la machine-à-broyer-de-l-humain, tsoin tsoin , perte d'âme et de sens critique , et plus le droit de perdre son temps . Pfou . tu sais ce que c'est le programme des nouveaux enseignements à la noix en seconde - arts visuels et arts du spectacle : découverte des métiers-bon- et les aspects économiques de ces domaines ... beuh ...
quelle tristesse, hein...
I have never been to this museum but it reminds me of Metropolitan museum in NY.. Beautiful collections!
ps. Thank you for your lovely comment on my blog. I like Serge Gainsbourg's songs too!
I enjoyed the Met and you're right, it's the same kind of museum: many many great artworks!